
Leçon 4 : Styles
Des premiers temps aux formes contemporaines du cinéma : le motif comme passeur de styles
Par Emmanuelle André (professeure en études cinématographiques, Université Paris 7-Diderot) Ciné-Conférence ponctuée d’extraits de films | en langue française | 60’
« Dès les premiers temps du cinéma, le cinéma sert de motif pour signifier ce qui se passe dans la tête de l’homme. Non pas seulement le contenu du cerveau, comme on le voit dans de nombreux films de la fin des années 1890 et du début des années 1900, mais aussi « la connaissance de soi », ou encore « la forme nouvelle, objective, de la conscience humaine ». L’expression est employée en 1925 par Bélà Balázs qui désigne le cinéma comme l’expression visuelle de notre esprit, son équivalent mécanique, car l’un et l’autre défilent, l’un et l’autre réfléchissent ce que nous sommes. Si, au début du XXe siècle, ce qui se passe dans la tête de l’homme s’accorde aux découvertes de la théorie freudienne, à cet inconscient révélateur d’une partie cachée de nous-mêmes que le film fait revenir à la surface de l’écran, à l’orée du XXIe siècle, le film continue de servir de métaphore pour illustrer les mécanismes de notre mémoire, dont l’image est rendue accessible par les outils de l’imagerie cérébrale. On s’étonnera que Du Mystère des Roches de Kador, réalisé en 1913 par Léonce Perret jusqu’à Fermer les yeux, réalisé en 2023 par Victor Erice en passant par Memoria d’Apichatpong Weerasethakul (2021), le cinéma continue d’exercer ses vertus thérapeutiques. Passeur de style, le film ? D’un siècle à l’autre, le tournage, le montage, la projection, sont des figures récurrentes utilisées par les cinéastes pour décrire les tréfonds de l’âme et les caprices de notre mémoire. À partir d’exemples variés, empruntés à différents moments de l’histoire du cinéma, on étudiera dans cette conférence ce qui, aujourd’hui, survit du film comme motif de la mémoire, quand la mémoire est désormais associée à un stockage de données, sans cesse vouées à s’effacer. » (Emmanuelle André)
» Interlude « snack & drink »
» Suivi de la projection du film :
Memoria
Colombie-Thaïlande-France 2021 | Apichatpong Weerasethakul | vostFR | 136’ | digital | Cast : Tilda Swinton, Jeanne Balibar, Elkin Diaz
» Prix du jury, Festival de Cannes 2021
« Again in a Apichatpong Weerasethakul film, we find spirits lurking behind the everyday world, but in Memoria, they might just be repressed memories emanating from a world that never actually forgets. » (Slant)